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Youyou Tu : Prix Nobel de médecine en 2015 grâce à la découverte de l’artémisinine

La MTC dans le monde - - Par Wafa G.

En 2015, à l’âge de 84 ans, Youyou Tu reçoit le prix Nobel de la Médecine pour ses travaux de recherche sur le paludisme. Douzième femme (et première Chinoise) à être récompensée par ce prix depuis qu’il a été créé en 1901, Youyou Tu s'est inspirée des connaissances de la pharmacopée chinoise afin d'étudier le pouvoir de l'artémisinine dans le traitement du paludisme. À l'honneur de la journée mondiale des droits des femmes, nous avons décidé de mettre la lumière sur Youyou Tu, une scientifique très justement honorée pour ses recherches sur le traitement du paludisme.

Le choix de la recherche médicale

Née en 1930 à Ningbo, une ville de l’est de Chine, Youyou Tu est issue d’une famille de la classe moyenne : elle a grandi auprès de ses quatre frères et a été élevée par une mère au foyer et un père travaillant à la banque. Dès son enfance, elle accorde une très grande importance aux études et parvient à fréquenter les meilleures écoles de Ningbo.

En 1945, Youyou Tu a quinze ans lorsqu'elle contracte la tuberculose. Elle fait alors l'expérience des lourdes conséquences de cette maladie... En effet, suite aux symptômes très pénibles qu'elle engendre (fatigue, toux chronique, fièvre, goût de sang dans la bouche), Youyou Tu s'est vue contrainte d’arrêter ses études pendant deux ans.

C’est après son combat contre la tuberculose, que de retour à l’école, Youyou Tu fait son choix : elle fera carrière dans la recherche médicale. Elle voulait rendre service à l'humanité et elle rêvait, disait-elle, « de faire quelque chose qui puisse aider le monde ».

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Ainsi, après avoir fini le lycée, Youyou Tu s'inscrit à l’Université de Pékin pour entamer des études en pharmacie où elle acquiert des connaissances en sciences pharmaceutiques et en pharmacologie occidentale. Durant son parcours académique, ses recherches furent dirigées par le pharmacologue Lou Zhicen.

Après avoir obtenu son diplôme en 1955, elle décide de s’inscrire à l’Académie de Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC) pour étudier cette médecine ancestrale si présente dans la culture chinoise. Elle deviendra, quelques années plus tard, professeure titulaire puis directrice de cette académie.

La menace du paludisme

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Pendant les années soixante, la recrudescence du paludisme fit des ravages principalement en Asie du Sud et au sud de la Chine. Jusqu’à présent encore, ce fléau mondial sévit. En effet, selon l'OMS, il s’agit de la 6ème cause de mortalité dans les pays pauvres1. Maladie potentiellement mortelle et problème majeur de santé publique, le paludisme, appelé aussi la malaria, est due à la présence d'un parasite du genre Plasmodium dans l'organisme, à la suite d'une piqûre par un moustique anophèle. Pendant un temps, la chloroquine était utilisée comme traitement antipaludique. Cependant, face à la montée de l'épidémie, elle n'a pas été suffisante pour éradiquer la maladie.

Très sérieuse, cette maladie se manifeste par des tremblements, des épisodes de fièvre aiguë, des sueurs, des maux de tête, de la toux, des douleurs abdominales, des nausées, ou encore des diarrhées et des vomissements.

En 1967, la malaria menaçait l'Asie et faisait de plus en plus de victimes, surtout dans le sud de la Chine. Le 23 mai de cette année, Youyou Tu, dont la réputation était bien établie, s’est vu confier par Mao Zedong un projet secret qui fut appelé “le projet 523”. Ce projet consistait à la mise en place d'un programme gouvernemental ayant pour but de trouver, grâce à la MTC, un remède contre le paludisme. Commença alors un très grand défi !

La découverte de l'artémisinine, « un cadeau de la médecine traditionnelle chinoise »

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Afin de se consacrer entièrement à la recherche d’un remède contre le paludisme, Youyou Tu s’exile à Hainan, une petite ville du sud de la Chine où la maladie sévissait lourdement à cette époque. Dans l’espoir de sauver les vies des personnes atteintes de la malaria, elle laisse ses deux enfants à Ningbo chez ses parents. Au cœur même de l'épidémie, elle a été témoin des effets dévastateurs de la maladie sur les populations et a particulièrement été touchée par ses conséquences sur les enfants. Il lui faudra trois années pour enfin revoir ses enfants et elle déclara plus tard qu’à ce stade que le travail était sa priorité et qu’elle était prête à sacrifier sa vie personnelle pour les autres.

S'en sont suivies de longues années de travail acharné. Durant ces années consacrées pleinement aux recherches, la scientifique a travaillé de concert avec son équipe pour étudier l'efficacité de 380 extraits médicamenteux à partir de plus de 200 plantes. En explorant les arcanes de l’art de guérir dans les anciens livres de médecine traditionnelle chinoise, Youyou Tu remarque l’effet antifébrile de Qing hao, ou l’Armoise annuelle (l’Artemisia annua), mentionnée dans « Le manuel de prescriptions pour les urgences » de Ge Hong, un texte datant d'environ 317 à 420 après Jésus-Christ. Dans les tests qu'elle réalise sur des souris, elle remarque que cette plante chinoise, connue alors pour calmer la fièvre, semble réduire le nombre de parasites dans le sang.

En se penchant sur l'Artemisia annua, elle fait la découverte de l’artémisinine, une substance dérivée de l’armoise annuelle. Elle modifie le processus d'extraction de cette substance pour la rendre plus efficace avant de l’isoler. Elle sera alors la première à tester ce remède. Puis, assurée de son innocuité, elle entreprit les essais humains sur de véritables patients atteints de malaria. Les tests se sont avérés concluants : en effet, l'artémisinine a permis de faire baisser la fièvre et de réduire le nombre de parasites dans le sang.

La découverte d’un traitement contre le paludisme a vu le jour grâce à la découverte et à l'étude de l'effet de l'artémisinine. C'est une nouvelle contribution à la planète qui montre que la médecine traditionnelle chinoise n’est pas aux antipodes de la médecine moderne, mais que bien au contraire les deux peuvent être complémentaires.

En 2015, lorsque Youyou Tu a reçu le prix Nobel de médecine, sa conférence s'intitulait « Découverte de l'artémisinine : un cadeau de la médecine traditionnelle chinoise au monde ».2

En 2021, la Chine a été certifiée exempte de paludisme par l'OMS (zéro cas pendant quatre années de suite). Si le pays a réussi à éliminer ce fléau, c’est en grande partie grâce aux recherches de Youyou Tu, une femme exceptionnelle dont la détermination et les sacrifices ont largement contribué à cette victoire mondiale. 3

Références
[1] OMS : Paludisme, 2021
[2] TU Youyou, Artemisinin—A Gift from Traditional Chinese Medicine to the World Nobel Lecture, December 7, 2015
[3] OMS : Questions-réponses sur l'élimination du paludisme en Chine, Quels outils ou stratégies novateurs sont essentiels pour que la Chine parvienne à éliminer le paludisme?, 2021.
Image
Bengt Nyman, CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons

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